Lectures « Afro-diasporiques » : expériences sensibles croisées à partir du Mexique noir

À partir de la lecture croisée de nos deux expériences anthropologiques menées au sein des populations afro-mexicaines de la Costa Chica (côte pacifique-Mexique), l’article entend s’interroger sur la pratique anthropologique au sein des Afro-amériques. L’article évoquera très brièvement le contexte de la société afro-mexicaine et le croisement de nos expériences respectives (pratiques de terrain)...

 


...Puis, il sera question de poser comme préalable à toute recherche sur « l’afro-diaspora », le positionnement réflexif, c’est-à-dire, la prise en compte des subjectivités raciales dans un contexte d’inter-subjectivités. Finalement, nous tenterons d’apporter d’autres postulats de lectures autour de l’ « afro-diaspora » à partir d’une lecture critique d’un dossier intitulé  « Re-penser les Amériques Noires » paru dans le Journal de la Société des Américanistes en 2005.

Mots clés : Afro-amérique ; Afro-mexicain ; Réflexivité ; Anthropologie ; Expériences croisées.

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Paul Raoul Mvengou Cruzmerino

Doctorant en anthropologie

Université Lyon 2

Centre de recherche: C.E.R.A.F.I.A (Centre d’Études et de Recherches Afro-Ibéro-Américaines, Université Omar Bongo, Libreville) ; C.R.E.A (Centre de Recherche et d’Études Anthropologiques, Université Lumière Lyon 2)

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Sébastien Lefèvre

Doctorant en études ibéro-américaines

Université Paris X

Centre de recherche: C.E.R.A.F.I.A (Centre d’Études et de Recherches Afro-Ibéro-Américaines, Université Omar Bongo, Libreville)

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Lectures « Afro-diasporiques » : expériences sensibles croisées à partir du Mexique noir(1)

 

Introduction

Cet article entend être une contribution originale à la réflexion sur les Afro-amériques (2) et en particulier sur les Afro-ibéro-amériques(3). Il partira de deux expériences anthropologiques(4), menées à différents moments, dans une même zone, sur une période qui va de 1999 à 2011, sans consultation mutuelle des anthropologues, une lecture croisée quant aux résultats obtenus. Plus précisément, Sébastien Lefèvre a mené des recherches anthropologiques de terrain dès 1999. Paul Raoul Mvengou Cruzmerino entreprend, pour sa part, des recherches anthropologiques de terrain dans la même zone depuis 2008. Il s’agira concrètement de croiser les deux expériences. Et il sera assez intéressant d’observer que nous sommes arrivés à des résultats d’analyse similaires dont nous rendrons compte au fur et à mesure de la démonstration. Notre souhait est donc d’interroger nos pratiques de terrain parmi les populations noires de la Costa Chica au Mexique et de les replacer dans le cadre plus large d’une réflexion sur les Afro-amériques.

Dans un premier temps, l’article évoquera très brièvement le contexte de la société afro-mexicaine et le croisement de nos expériences respectives. Dans un deuxième temps, il sera question de poser comme préalable à toute recherche sur « l’afro-diaspora », le positionnement réflexif : la prise en compte des subjectivités raciales dans un contexte d’intersubjectivités. Dans un troisième et dernier temps, nous tenterons d’apporter d’autres postulats de lectures autour de l’ « afro-diaspora » à partir d’une lecture critique d’un dossier intitulé  « Re-penser les Amériques Noires » paru dans le Journal de la Société des Américanistes (Capone ; Hoffmann, 2005).

 

I.   Contexte

Le Mexique compte avec des populations afro-descendantes minoritaires vivant de manière très territorialisées et marquées au sein de deux grandes régions : dans l’Etat de Veracruz (côte Atlantique) et dans la région de la Costa Chica (côte Pacifique) et regroupant les Etats de Guerrero et d’Oaxaca. Cette région de la Costa Chica, qui va approximativement du port d’Acapulco jusqu’au port d’Escondido, est également habitée par des populations dites « métisses » (mestizas, interprétées comme « blanches ») et des populations indiennes (indígenas telles que les amuzgos, les mixtecos, les nahuas…). Ces populations afro-descendantes sont issues de l’histoire coloniale et de la pratique de l’esclavage. En effet, cette région de la Costa Chica fut le lieu d’implantation d’une économie rurale espagnole à l’époque coloniale (bétail, coton, café, pêche, sel). En plus, les ports d’Acapulco et de Huatulco ouvraient une porte au commerce trans-colonial (Les Philippines et le Pérou colonial) et furent très demandeurs des produits de l’économie rurale. En outre, du fait du faible contrôle espagnol sur la zone, de la proximité d’enjeux économiques, de la difficile accessibilité de la région, s’organisèrent des activités de marronnage(5) (fuite, résistance à l’esclavage, etc) dans toute la Costa Chica.

 

II.   Pratiques de terrain respectives

 

A.  Ethnographes et corps(6)

 

Il s’agira dans cette section de présenter très brièvement au lecteur les corps ethnographes différenciés qui ont été en jeu durant les différentes recherches de terrain.

Paul est issu d’un contexte familial métis, de père gabonais, de tradition culturelle Fang, de mère mexicaine, sociabilisé au sein de la société gabonaise, il a aussi reçu une sensibilité culturelle mexicaine (langue, nourriture, etc). Par ailleurs, il est en formation doctorale en anthropologie dans un autre pays que les siens (Mexique et Gabon). Par conséquent, il a reçu d’autres outils d’analyse des réalités sociales. Toutes ces influences interrogeront sa pratique de terrain et sa construction discursive anthropologique.

Sébastien est ce que l’on pourrait nommer un français blanc. De par son père il est issu d’une famille paysanne, et relève d’une sensibilité foraine du côté maternel. Lui aussi a reçu une formation intellectuelle plurielle. En effet, il a initié son cursus par des études hispaniques qui ont été enrichie par des recherches anthropologiques de terrain. De la même façon que Paul, tous ces paramètres influenceront sa construction discursive anthropologique.

Nos deux corps anthropologues sont phénotypiquement(7) différenciés comme on peut s’en douter! Paul est perçu avec une certaine ambiguïté selon les différentes subjectivités raciales. En France, par exemple, il peut être vu comme noir, maghrébin, voire antillais ou encore métis. Des signes corporels l’y renvoient : couleur de peau, cheveux crépus, etc. Au Gabon, il relève d’une élite métisse. Au Mexique, dans la capitale, il est perçu comme negro, sur la Costa Chica il est vu comme negro, moreno, prieto. Sébastien, quant à lui, est perçu comme blanc, sur la côte on l’appelle d’ailleurs le blanc (El güero).

 

B.   Méthode

Nos deux méthodes ethnographiques ont été inscrites volontairement dans une démarche de partage du sensible du vécu social afro-mexicain. En effet, la pratique ethnographique de Paul relève d’une tentative d’observation et de participation dans la vie sociale des groupes de populations afro-mexicaines de la Costa Chica en mobilisant une modalité empathique(8). Dans sa famille d’accueil, il a progressivement appris à se sociabiliser dans le contexte de la Costa Chica. Sébastien, lui, a éprouvé dans sa pratique de terrain les questionnements méthodologiques contingents à la démarche anthropologique. Ces derniers ont été la résultante d’un processus de signification alliant formation discursive hispanique et vécu du terrain. Il a progressivement construit une méthode « propre » : le sentipensar. Le sentipensar signifie, pour lui, mettre son corps en tant qu’organe de sens à disposition pour pouvoir percevoir dans son entièreté la culture étudiée. Par la même, sa démarche participe d’une approche relationnelle des corps(9), une approche d’autant plus pertinente dans le contexte afro-mexicain multiracial.

 

C. Expériences de terrain : Corps en co-présences ou quel jeu de miroir ?

Dans cette section, il sera question d’évoquer nos différents corps dans l’expérience ethnographique du Mexique noir. Le croisement de nos vécus nous permettra d’interroger l’enjeu socio-racial que recouvrent les corps différenciés. Dans ce dessein, nous partirons de quelques exemples concrets qui reflètent ces questionnements.

Trois exemples extraits du terrain de Sébastien :

 

Exemple 1 : La première famille qui m’a accueilli sur la Costa Chica était d’une classe socio-raciale élevée. Leur nom de famille était associé à une descendance directe espagnole, de grands propriétaires terriens et bovins. Le mari était blanc, la femme métisse (plus blanche que noire). Les enfants avaient laissé derrière eux, en quelque sorte, une part de leur stigmate racial noir. Quelle image je renvoyais à cette famille ? Je me souviens que l’épouse avant d’accepter de me recevoir avait demandé à son fils s’il acceptait de m’héberger : l’aurait-il fait si j’avais été noir ? Sans nul doute que mon « capital racial » en tant güero aux yeux verts dans leur échelle de valeur était élevé. Par ailleurs, j’ai pu me rendre compte lors de mes sorties dans le village que les gens m’associaient à la blancheur de la famille. À quelques reprises, on m’a fait remarquer que je n’étais pas dans n’importe quelle famille, c’est-à-dire, que j’étais dans une famille de blancs.

Exemple 2 : Après un temps passé sur la côte, je connaissais déjà nombre de villages et par conséquent nombre de personnes. Certaines personnes, d’un village à l’autre, même si elles ne me connaissaient pas directement avaient entendu parler de moi. Un blanc (un güero) étranger était là. Un jour alors que je me trouvais être dans un village proche du village précédent où j’avais séjourné, une dame me fit part qu’elle avait entendu parler d’un blanc un peu fou qui traînait dans telle localité, buvant avec des prostituées lors d’une veillée mortuaire passée. Ce blanc là, marchait sans chemise et pieds nus. Je lui confessais qu’il s’agissait de moi mais elle ne voulut jamais me croire. Pourquoi n’a-t-elle jamais voulu me croire ? Est-ce parce que je ne correspondais à ce qu’on attendait d’un güero.

Exemple 3 : Après une longue présence sur le terrain, je m’étais familiarisé considérablement avec la culture des afro-mexicains. Lorsque je changeais de village, en arrivant, on me demandait comment je m’appelais, d’où je venais etc. Je m’amusais quelques fois, pour voir la réaction des gens, à dire que je m’appelais tel et que je venais de tel village de la côte. Les gens me regardaient perplexes. Puis lorsque je riais, alors ils riaient aussi. Tout simplement parce que je savais et qu’ils savaient que le nom de famille employé et le village mentionné était, à très grande majorité, connus et reconnus comme noirs. Mon phénotype ne correspondait pas à une généalogie noire.

Trois exemples extraits du terrain de Paul :

Exemple 1 : Une fin d’après-midi à Llano Grande (état d’Oaxaca), je discutais avec une « Tante » noire (catégorie d’âge locale) et on évoquait les pratiques d’entretien corporel. Cette Tante me toucha les cheveux (qui avaient bien poussé depuis mon arrivée) et me dit en souriant : « Tu les a bien collés, bien durs…Tu les as comme nous ». Et elle me conseilla de l’huile de coco pour bien les peigner, surtout au réveil.

Exemple 2 : Alors que je dînais avec des amis à Llano Grande, la gérante d’un petit stand de tacos à domicile m’interrogea sur la vie en Haïti et à Cuba, elle pensait comme d’autres personnes que j’étais originaire de ces pays. D’ailleurs lors de mes premiers déplacements sur la Costa Chica, ces origines « diasporiques » m’étaient directement attribuées à cause de mon corps.

Exemple 3 : Je participais à un travail dans une école de Tapextla (état d’Oaxaca) autour d’un retour de l’œuvre de Gonzalo Aguirre Beltrán(10). J’évoquai  le registre des interprétations subjectives liées à la couleur, et des termes employés pour désigner le noir, il y eut un incident, une petite fille noire se mit à pleurer lorsqu’elle fut évoquée comme noire : elle nous dit qu’elle n’aimait pas. Durant ce même exercice, je fus aidé par des collègues de l’INAH(11) et nous fûmes bien différenciés corporellement, pour le coup, moi j’étais vu comme moreno, moreno claro ; tandis que des collègues comme blancos.

Tous ces exemples tirés de nos expériences respectives, montrent bien l’enjeu socio-racial des corps dans la relation ethnographique.

 

III. Quelles conséquences pour une recherche sur le « Mexique noir » et sur l’Afro-amérique ?

 

Comment à partir de nos sensibilités croisées, pourrions-nous tenter d’objectiver ces expériences ? Faudrait-il juste évoquer nos expériences pour faire notre part de réflexivité ? Comment écrire ces retours réflexifs dans notre interrogation sur les sociétés des Afro-amériques ?

L’expérience de Paul avec les populations afro-descendantes du Mexique relève d’une sensibilité multi-située (contexte personnel métis). Dans sa pratique de terrain, il ne pouvait nier sa ressemblance physique avec certains de ses interlocuteurs. Or, dans de nombreux travaux interrogeant les Afro-amériques, le corps ethnographe semble invisible, alors qu’il s’agit de contextes afro-américains marqués par l’axiologie coloniale (hiérarchisation symbolique esthétique liée au corps). Il est donc nécessaire de tenter une certaine objectivation des liens avec le vécu dans le « Mexique Noir ».

Il s’agit pour Paul, premièrement, de privilégier la description des expériences ethnographiques mobilisées dans différents contextes (prises de notes, enregistrements). Cette ethnographie est la connaissance du social. Deuxièmement, il est important pour lui d’établir un dialogue avec les interlocuteurs privilégiés sur la Costa Chica, ou plutôt un échange interprétatif de certaines de ses considérations ou points de vue. Troisièmement, il serait pertinent d’opérer une comparaison littéraire, des autres contextes des sociétés afro-latino-américaines pour voir les différences et continuités. Quatrièmement, considérant que l’écriture en elle-même est l’espace de négociation, il est nécessaire de prendre en compte le ressenti de l’expérience et les trajectoires personnelles. Ceci permettrait une réflexion sur le temps, les lieux et les modes de l’écriture comme le pose Stuart Hall (2007)(12).

Pour Sébastien, prendre en compte les différentes subjectivités raciales, le corps des ethnographes et le corps des autres est un enjeu dans une relation ethnographique sur la Costa Chica. Cet aspect est encore plus fondamental au regard de la méthode postulée et mise en œuvre. En effet, la méthode qu’il a nommé le sentipensar, engage le corps de l’ethnographe dans une relation, de fait inter-corporelle, donc, intersubjective. Ces corps sont selon la formule de Merleau Ponty des « voyants visibles » (Merleau-Ponty, 1991), nous voyons depuis notre corps et l’on nous voit aussi. Même si la méthode postulée, visée le plus possible, à effacer sa propre culture pour adopter la culture des afro-mexicains, son corps était là, habillé par une certaine sémantique corporelle, héritée de l’axiologie coloniale dont nous avons parlé antérieurement. Son corps, dès l’origine, de sa pratique de terrain, fut rangé dans une case qui correspondait à un corps blanc, un corps blanc étranger. Il a voulu effacer tous les milieux dont il était détenteur, formation discursive, pratique culturelle, mais il était un milieu dont il ne put se défaire : son corps.

Les exemples sélectionnés pour rendre compte de cette réflexion sur le corps, reflètent considérablement cet aspect des choses. En outre, on peut se rendre compte, d’emblée, avec l’ensemble des exemples, que son corps était perçu, autre, différent phénotypiquement. Son corps était chargé d’une sémantique particulière, reflétant un certain « capital racial » dans les relations aux autres. Par ailleurs, son corps blanc aurait dû jouer certains rôles et non pas des rôles (re)connus comme étant plus des rôles de noirs parmi la population afro-mexicaine. Un blanc, en principe, n’agit pas de telle ou telle façon mais de telle autre. Puis, les exemples sur les noms de famille, montrent que certains noms sont plus associés à une descendance blanche et d’autres à une descendance noire.

Il est nécessaire aussi d’établir quelles ont été les implications concrètes de toutes ces réflexions dans l’élaboration du travail. Il est apparu indispensable de retranscrire et d’analyser tout ce dont nous avons parlé jusqu’à présent car il s’agit d’une donnée concrète (enjeu socio-racial des corps dans la relation ethnographique), fondamentale, que l’on peut rencontrer dans la pratique de terrain sur la Costa Chica. Comment alors l’éluder ou ne pas la mentionner si elle est au fondement ? Ce questionnement permet notamment de prendre en considération les filtres qui peuvent empêcher une analyse objective. Par exemple, nous avons souvent vu et entendu des anthropologues(13) avancer que sur la Costa Chica il n’y avait pas d’identité noire car lorsqu’ils demandaient aux gens, c’est-à-dire aux noirs, de se définir, ils ne répondaient pas qu’ils étaient noirs mais morenos, foncés par conséquent(14). Ces anthropologues, selon nous, n’ont pas mesuré les conséquences encore contemporaines que peut exercer cet héritage colonial. Comment quelqu'un de censé, connaissant la société dans laquelle il vit, une société où le blanc est encore vu comme un modèle à atteindre, va se définir, qui plus est, face à des anthropologues blancs, ou métis blancs, comme noir ? Les gens jouent et se jouent de tout cela. Et ce jeu est présent dans les relations que l’on peut établir avec les afro-mexicains au sein de la Costa Chica. Donc, prendre en compte ce questionnement c’est l’intégrer au champ du possible des analyses.

Enfin, l’approche concernant les différentes subjectivités raciales est rentrée directement dans nos résultats d’analyse. Nos expériences ont montré que même s’il n’y a pas de revendication (de moins en moins aujourd’hui) d’une « identité noire » clairement énoncée, définie, elle l’est de fait par les corps. Le fait que l’attitude de Sébastien évoquait, chez certains, des soupçons de folie, du fait qu’un blanc n’avait pas à se comporter ainsi, démontre qu’il existe une certaine façon d’être noir, afro-mexicain, Moreno, etc.

 

IV. Postures et propositions

 

Au regard de tout ce qui a été avancé antérieurement, quelles sont les possibilités quant à une pratique ethnographique au sein des sociétés des Afro-amériques ? Les permanences  axiologiques des corps procédant d’une histoire coloniale dans les sociétés des Afro-amériques ne nous semblent pas devoir être réduites à un simple malaise d’un ethnographe ou d’un anthropologue sur le terrain. Il est certes gênant que sur le terrain, des considérations « raciales » et empiriques que l’anthropologue croit avoir détruit soient toujours présentes ; mais il n’est  pas possible d’assurer une position de non prise en compte de ces considérations. Ces dernières sont même portées sur le corps-anthropologue. Il est question du corps-anthropologue, corps de l’autre qui prennent une dimension très marquée dans les sociétés traversées par des hiérarchisations sociales basées sur le phénotype. En outre, dans ce champ d’interrogation que constituent les réflexions autour des Afro-amériques, il convient de noter les différences de sensibilité et des héritages de « champ » au sens de Bourdieu (1980) qui facilite le jugement de valeur de certaines recherches, mais dédouanent certaines de ces mêmes critères de jugement de valeur.

Nous pensons souligner deux propositions de bases qui devraient constituer selon nous des préalables pour mener une ethnographie dans les sociétés des Afro-amériques. Premièrement, il s’agit de mener une description du détail, de l’infiniment anodin, du quotidien. Ces « tout petits liens » sont du social pur. Cette quotidienneté passe par l’observation des maisons, des couleurs, des personnes avec qui l’on vit, des paroles échangées. Il s’agit d’un sensible partagé. La particularité des sociétés des Afro-amériques est le vécu intime des dominations coloniales, beaucoup de pratiques culturelles sont codifiées et relèvent du détail, du subtil. L’ethnographie n’est pas que la simple observation, elle est aussi cette participation corporelle.

Deuxièmement, il est important de prendre en compte son corps dans ces dynamiques axiologiques prégnantes dans les sociétés. L’ethnographe est aussi soumis à l’autre. Dans les sociétés des Afro-amériques dans des contextes ruraux marginaux, cette intériorisation des valeurs corporelles ne peut pas être tue au risque de finalement biaiser le contexte d’interrogation de la recherche.

 

V. Repenser les Amériques noires ?

 

Il nous a semblé opportun de rendre compte d’un dossier coordonné par Stefania Capone (2005), intitulé « Repenser les ̏Amériques noires˝ ». Nouvelles perspectives de la recherche afro-américaniste ». En effet, étant donné que ce dossier se veut novateur en termes de pistes de recherches, il est un bon support pour confronter nos résultats avec d’autres chercheurs du champ(15).

Dans sa présentation du dossier consacré à la réflexion autour des contextes afro-américains, Capone fait un très bref historique du champ de recherche afro-américaniste. L’auteur revient sur les différences et déséquilibres entre les contextes intellectuels latino-américains et nord-américains en reprenant l’argument de Roger Bastide(16) sur la perspective sociologique des réflexions américaines et une autre plus culturaliste et anthropologique. Elle complexifie la définition du champ « Amériques noires » en évoquant le fait que certaines inflexions du social afro-américain ne sont plus l’exclusivité de ces populations (prenant l’exemple de certaines pratiques religieuses). Elle souligne la tension classique entre les postures d’analyse inaugurale du champ de réflexion afro-américain ; d’une part, une certaine « épistémologie vérificationniste » cherchant à identifier les passés et cultures authentiques africaines dans les Amériques, et d’autre part, la perspective de créolisation défendue par des auteurs tels que Sidney Mintz(17). Ce champ d’études est né sur ces décalages entre « continuité » et « discontinuité » transatlantique comme le soulignait Roger Bastide et qui fait dire à Capone que « De l’Afrique à l’Amérique et vice-versa, l’une ne semble pas avoir de sens sans l’autre ! ». Elle propose de sortir de ce « champ de bataille idéologique » qui semble traverser le champ afro-américain en interrogeant les formes d’identifications des cultures noires moins homogènes et plus éclatées, relevant plus de processus et de situations particulières tout en n’évacuant pas de l’analyse les liens africains (Capone, 2005 : 88).

Or, ne peut-on pas penser que ce « champ de bataille idéologique » est le fait d’une absence de prise en compte d’une réflexivité de la part des chercheurs autour de leur démarche intellectuelle sur les réflexions afro-américaines ? Capone ne revient pas sur les axiologies coloniales (corps et hiérarchisation sociale) toujours en vigueur dans les sociétés des Afro-amériques. L’une des faiblesses de ce texte est son insistance sur les débats afro-américains (USA) comme représentatifs de toutes les Amériques, surtout en ce qui concerne les postures politiques « afro-centriques », par les usages des concepts de races. La communauté intellectuelle maîtrise les dimensions réductionnistes de ces axiologies, mais force est de constater leur maintien dans le quotidien des sociétés afro-américaines, pour autant, doit-on les évacuer des analyses ? En d’autres termes, comment mène-t-on une recherche dans les sociétés des Afro-amériques sans prendre en compte sa propre démarche ? Comment construit-on un savoir, à partir de pratiques de terrain dans les sociétés des Afro-amériques ? Comment, que l’on soit jeune chercheur afro-américain ou européen, l’intérêt pour la réflexion afro-américaine est décisif ?

En outre, devrait-on réduire les lieux communs d’une inflexion afro-américaine (il est fait référence ici plus au monde afro-latino-américain) à une simple fragmentation ? Le souci de complexifier les études du champ afro-américain peut tendre à une réduction des trajectoires des populations afro-américaines à de simples identifications non décisives et totalement éclatées.

Enfin, toute forme d’identification humaine est relationnelle et situationnelle. Les formes d’identification noires relèvent de ce postulat, « être noir et américain » ou « noir et péruvien » n’épuisent pas les autres modes d’identification (classe sociale, catégorie d’âge, genre) comme le faisait d’ailleurs remarquer Paul Gilroy dans les premières lignes de son ouvrage : Atlantique Noir (2003). D’ailleurs, ces formes d’identifications noires restent marquées par cette axiologie coloniale, qui stratégiquement, amène les populations à mobiliser d’autres modes de représentation.

Or, dans la présentation de Capone, il n’y a clairement qu’une volonté de prise en compte du caractère fragmenté largement partagé par la majorité des recherches sur les trajectoires afro-américaines et qui tendent à réduire les expressions signifiantes communes et décisives au sein des populations afro-américaines, et le reproche fait aux postures afro-centriques peut être renversé, pourquoi voir trop rapidement de la fragmentation ou réduire les expressions transversales afro-américaines à de simples concours historiques ? Nous ne soutenons pas que  par nos pratiques de terrain les formes d’identification noires soient essentialisées, nous soutenons la récurrence d’une transversalité des pratiques dans les sociétés afro-américaines(18).

Nous allons, pour donner plus d’ampleur à nos postulats, nous intéresser à un texte d’Odile Hoffmann inclus dans le dossier en question. Nous l’avons choisi car il traite du « Mexique noir »(19).

Odile Hoffmann (2005) propose, dans son article, « Renaissance des études afro-mexicaines et production de nouvelles identités ethniques » de débattre autour des formes d’identifications des populations afro-mexicaines de la Costa Chica entre les positionnements politiques, les espaces et expressions d’inflexions socio-culturelles noires, et les difficultés de la recherche afro-mexicaine dans son versant anthropologique.

Elle soutient que l’ensemble des populations afro-mexicaines sont plus préoccupées par leur statut de citoyen que par le fait de soutenir un discours ethnique différencié (Hoffmann, 2005 : 125-126). L’axiologie coloniale exprimée empêche une prise en charge d’une posture « ethnique », qui tend quand même à prendre forme. De plus, la situation du Mexique reste particulière. En effet, l’auteur soulignera la faible présence numérique des populations afro mais aussi une invisibilité nationale qui contraste avec leurs différences localement situées. Puis, elle relèvera aussi l’absence de cadre politique particulier de reconnaissance et l’omniprésence de l’idéologie de l’indigénisme et du métissage. Par ailleurs, le champ d’étude afro-mexicaniste n’arrive pas à sortir des héritages de Gonzalo Aguirre Beltrán. Finalement, on n’observe pas une élite intellectuelle afro-mexicaine à proprement parler. Ce dernier élément n’aurait pas favorisé un discours revendicatif très fort. Ainsi, sur la Costa Chica, peu de personnes vont mobiliser une identification afro. L’auteur soutient alors que le socle le plus efficace en termes de mobilisation identitaire pour ces populations est la défense d’une égalité citoyenne plutôt qu’une identité noire.

Hoffmann évoque des lieux d’identifications noires peu décisifs et peu distinctifs, ce qui la conduit à souligner la fragmentation et le caractère stratégiquement contextuel de l’identité noire sur la Costa Chica même si elle reconnaît des traits d’origines africains, elle insiste sur le fait qu’il n’y a pas une identité assumée différenciée. Aussi, les problèmes de postures politiques afro-diasporiques ne lui semblent pas pertinents dans le cas mexicain (Hoffmann, 2005 : 136-137). Et d’ajouter : « Pour autant, les distinctions analytiques restent valides. En effet, selon les contextes, les espaces et les rapports locaux de subordination, les Afro-mexicains activent certaines options plus que d’autres, individuellement ou collectivement. » (p144).

Enfin, elle accuse l’ethnographie afro-mexicaine d’approche folklorisante (du fait que cette ethnographie est principalement l’œuvre d’étudiants en anthropologie) et de ne pas prendre en compte les processus issus des histoires partagées entre les autres groupes de populations. Elle préconise, en outre, une recherche axée sur les différentes catégorisations contextuelles et localement signifiantes. Elle veut souligner ainsi les différences d’échelles collectives et individuelles entre modes d’identification dans les différentes localités de la Costa Chica. Dans cette perspective, les « faits culturels » sont des instruments de positionnements sociaux et manipulables par les individus et les groupes.

Toutefois, les postulats d’analyse proposés par Hoffmann ne résistent pas à une interprétation subtile des rapports intersubjectifs au sein de la Costa Chica. En effet, les populations afro-mexicaines sont conscientes de leurs différenciations corporelles (cf. analyse réflexive de notre terrain), comme en témoignent les différentes expressions locales pour désigner les corps noirs (couleur de peau, type de cheveux, nez), ou leurs différentes mobilisations orales comme los versos(20). Aussi, les blagues et représentations autour des corps plus noirs sont largement partagées dans la région de la Costa Chica. Ces corps noirs sont chargés d’axiologie coloniale, par exemple, de par les noms de familles, comme on l’a signalé, il est possible localement d’identifier les noirs dans le cœur de la Costa Chica (Cuajinicuilapa-Santo domingo). Des noms comme Noyola, Mariche, Serrano, Laredo et Arrellanes sont connus comme étant des familles noires, Santiago plutôt indigène, et Baños blanc.

Les expériences du racisme et de discriminations sont fortes dans les formes de vécu afro-mexicain (manière de parler, corps noir stigmatisé, localisation sur la côte, etc). Mais, réduire les espaces d’identifications noires à la défense d’une égalité citoyenne (souci largement partagé dans les autres sociétés des Afro-amériques) à cause de l’absence de discours et de revendications collectives politiques sur la Costa Chica, par exemple, n’est-ce-pas avoir une vision réduite de la culture et de l’identité afro-mexicaine ?

Il conviendrait, en outre, de s’interroger sur les raisons pour lesquelles les inflexions du social afro-mexicain sont largement partagées dans la région de la Costa Chica ? Pourquoi dans toute la région dans laquelle se retrouvent des populations afro-mexicaines, sont pratiqués le mariage par huida(21), le queridato(22), les oralités rimées en mode défi, la Danza de los Diablos avec une mobilisation du tambour à friction, les complexes de fêtes et danses patronales, des pratiques corporelles et musicales différenciées (Lefèvre, 2011), la croyance en de saints noirs, la convocation des récits alternatifs et subversifs sur la présence noire sur la côte, certains savoir-faire récurrents (huile de coco, techniques de pêches) ?

Loin de vouloir systématiser ou de tomber dans un certain folklore, ne peut-on pas dès lors souligner un certain ensemble signifiant ? En outre, que veut dire une identité « assumée » ? Odile Hoffmann dans son article évoque le caractère non « assumé » d’une forme d’identification noire et afro réduisant la charge axiologique et coloniale à une simple dimension moralisante. En clair, comment revendiquer une posture d’identification qui a été toujours négative ? Lorsque l’on parle des communautés afro-mexicaines de la Costa Chica, il convient de préciser les dimensions rurales, marginalisantes et territoriales dans lesquelles survient l’axiologie coloniale qui est largement efficace.

Odile Hoffmann n’évoque pas non plus la possibilité de prise en compte d’une démarche réflexive autour de son propre positionnement théorique dans les propositions qu’elle émet comme nouvelles pistes de recherches Or, encore une fois, comment construire un savoir à partir de pratiques de terrain dans l’afro-Mexique, sachant que l’une des conditions du savoir anthropologique réside dans l’expérience de terrain, c’est-à-dire, l’expérience des corps en relation. Cela signifie prendre en compte sa propre positionnalité dans le cadre d’une relation intersubjective marqué par un fort héritage coloniale.

 

Conclusion

 

Nous avons voulu montrer au travers de la brève analyse réflexive de nos expériences parmi les afro-mexicains qu’il n’est pas possible de mener une ethnographie en leur sein sans prendre en compte un aspect fondamental de l’expérience qu’est le corps-anthropologue. Les corps restent marqués par l’héritage contemporain de l’axiologie coloniale passée. Par conséquent, cette donnée rentre en compte dans la construction et le cheminement de l’enquête mais aussi et surtout dans l’interprétation des résultats finaux.

Malheureusement, force est de constater que cette donnée essentielle ne semble pas faire l’objet d’une attention particulière au sein du champ afro-américaniste actuel, du moins, c’est ce qu’a montré le compte-rendu critique de deux textes qui se veulent novateurs en termes de pistes de recherches sur l’Afro-amérique. Les textes de Capone et d’Hoffmann à aucun moment donné ne s’interrogent sur leurs démarches anthropologiques. Ces dernières semblent aller de soi et semblent ne pas comporter d’enjeu idéologique. Les auteurs se placent de fait au-dessus du champ de « bataille idéologique » dénoncé par Capone.

En effet, l’absence de prise en compte de réflexivité quant au corps-anthropologue dans leur démarche dessine les limites d’une telle position. Ce fait souligne la non prise en compte de leur propre subjectivité et de leur propre positionnement, académique, institutionnel au sein du champ. Lorsque Hoffmann, par exemple, dénonce les chercheurs qui viennent de l’extérieur du Mexique imposer leur paradigme de lecture (Hoffmann, 2005 : 139-140), pourquoi ne pas s’interroger de la même façon sur ses propres paradigmes ? D’autant plus que, de 2002 à 2006 Hoffmann a été elle-même coordinatrice d’un projet international de recherche (IDYMOV(23)). Ne peut-on pas émettre les mêmes critiques à l’égard de ce projet ? Les chercheurs qui y ont participé auraient-ils été exempts de toute idéologie ? N’auraient-ils pas pu appliquer des idées, des concepts, des démarches qui ne correspondraient pas à la réalité afro-mexicaine ?

Nous pourrions formuler les mêmes inquiétudes quant au texte de Capone lorsqu’elle  dénonce les discours afro-centriques. En effet, si l’on taxe un discours d’afro-centricité, cela présuppose l’existence d’un discours non afro-centrique. Or, à aucun moment donné l’auteur ne précise depuis quelle position elle parle ? Sa position semble se placer au-dessus des positionnements idéologiques(24). Or, ne provient-elle pas d’une tradition discursive occidentale universaliste ? Ne peut-on pas se demander dans ses conditions si son discours n’est pas le résultat d’une construction euro-centrée de la réalité afro-américaine ?

Finalement, repenser les « Amériques Noires », serait pour nous en premier lieu, commencer par la prise en compte de postulats émis antérieurement concernant l’approche réflexive(25). En outre, cette approche permettrait de replacer le corps des anthropologues et des populations que ceux-ci côtoient dans leurs rôles hérités de l’axiologie coloniale. Cela ne signifie pas les enfermer à tout jamais dans ces rôles mais au contraire tenter de faire « parler » leurs subjectivités socio-raciales. Subjectivités qui ont des incidences concrètes quant à la construction du discours anthropologique. Et c’est pour cette raison majeure qu’on ne peut les taire.

 

Notes de bas de pages

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(1)Cet article fait suite à une contribution (qui n’a pas pu être présentée finalement) pour le colloque Réflexivité en contexte de diversité, Université de Limoges, DYNADIV, 1 et 2 décembre 2010.

(2) Ensemble des populations issues de la traite négrière transatlantique

(3) Sociétés marquées par la colonisation espagnole.

(4) Pour une meilleure clarté, nous avons tenu à différencier l’emploi du « Je »  et du « Nous ». Le « Je » sera employé lorsque l’un de nous fera référence à sa propre expérience. Le « Nous » sera employé lorsque nous croiserons nos expériences.

(5) « Le mot français marron vient de l’espagnol cimarrón, mot dérivé des Indiens Tainos des grandes Antilles. À l’origine, le mot cimarrón désignait le bétail échappé dans les collines Hispaniola. Puis il a servi à qualifier les esclaves amérindiens qui fuyaient les Espagnols. À la fin des années 1530, il a commencé à s’appliquer exclusivement aux fugitifs afro-américains et s’est teinté s’une forte connotation de courage et de caractère indomptable. » Richard et Sally Price, Les marrons, Vent d’ailleurs, Auxerre, 2003, p9.

(6) Il s’agira dans cette section de présenter très brièvement au lecteur les corps ethnographes différenciés qui ont été en jeu durant les différentes recherches de terrain.

(7) Lié au phénotype, c’est-à-dire, les caractéristiques extérieures observables du corps.

(8) La modalité empathique fait référence à l’observation participante et la participation observante.

(9) Cette approche relationnelle (intersubjectivité) est minoritaire dans le champ afro-américaniste mais aussi en règle général dans le champ anthropologique. La seule auteure identifiée sur ce sujet est Nadia Mohia, voir en particulier son livre L’expérience de terrain. Pour une approche relationnelle dans les sciences sociales (2008 : 18) : « L’ethnologue sur le terrain est une personne qui continue de vivre. Il reste un sujet entier, engagé par une relation à l’autre totale, c’est-à-dire par sa subjectivité propre, son histoire personnelle et son appartenance à une société donnée. Telle est la réalité primordiale de l’expérience qui se trouve niée dans la définition a priori de la pratique. »

(10) Pionnier des études afro-mexicanistes

(11) Instituto Nacional de Antropología e Historia.

(12) « Nous écrivons et parlons depuis un lieu et un temps particulier, depuis une histoire spécifiques. Ce que nous disons est toujours en contexte,  positionné. » (2007 : 228).

(13) Anthropologues associés notamment au projet IDYMOV Mexique-Colombie (2003-2006), coordonné par Odile Hoffmann.

(14) Pour notre part, nous n’avons pas rencontré systématiquement ce type de réponse. Souvent même, après que la relation de confiance se soit établie, les gens ne voyaient pas d’inconvénients, bien au contraire, à se dire noirs.

(15) Loin de tomber dans des polémiques stériles, il s’agit ici d’ouvrir un vrai débat au sein du vaste champ d’étude afro-américaniste et de sa particularité dans la littérature francophone.

(16) Sociologue français et pionnier en France des études afro-américanistes, voir Les amériques noires (1967), Le candomblé de Bahia, rites Nâgo (2000).

(17) Anthropologue américain, spécialiste des afro-amériques voir The birth of African-American culture : an anthropological perpspective (1992).

(18) L’espace de cette contribution ne nous permet pas de rentrer dans les détails pour expliquer ce que nous entendons par transversalité des pratiques dans les sociétés afro-américaines. Toutefois, il conviendrait de s’interroger sur des récurrences en termes de musique-danse-oralité, de mythe fondateurs, de contes, de mémoire etc.

(19) Le dossier sur les Afro-amériques présenté par Capone contient différents articles sur Haïti, Cuba, USA, Brésil entre autre. Or, nous nous en sommes tenus à celui qui traite du Mexique Noir car il constitue le sujet de nos recherches. Par conséquent, nous nous sentons plus aptes à l’interroger.

(20) Poésie orale.

(21) Mariage par fuite.

(22) Système d’alliance polygynique.

(23) URL www.odilehoffmann.com

(24) « Il me semble nécessaire aujourd’hui de sortir de ce que l’on pourrait appeler « un champ de bataille idéologique », Capone, op.cit, p87-88.

(25) L’espace pour cette contribution étant limité, nous avons concentré notre propos sur la nécessaire approche réflexive. Néanmoins, « repenser » les Amériques Noires serait pour nous aussi replacer les populations afro-américaines dans leurs historicités et leurs trajectoires historiques particulières, c’est-à-dire, issues de populations africaines dotées de cultures spécifiques. Cette approche permettrait de replacer ces populations dans le cadre d’une approche diasporique pertinente pour la recherche afro-américaine (inflexions sociales afro-américaines récurrentes dans différents pays où sont présentes les populations afro). Enfin, il nous semble opportun de donner une approche triangulaire à la recherche afro-américaine. L’approche triangulaire consisterait à étudier à la fois l’histoire européenne, africaine et américaine car les processus présents en Amérique peuvent trouver leur signification en Europe mais aussi en Afrique (Ngou Mve, 1997).

 

Bibliographie citée

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Revue:

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Pour citer cet article:

Mvengou Cruzmerino Paul Raoul, Lefèvre Sébastien, "Lectures "Afro-diasporiques" : expériences sensibles croisées à partir du Mexique noir", RITA, n°5: décembre 2011, (en ligne), mis en ligne le 20 décembre 2011. Disponible en ligne http: http://www.revue-rita.com/regards/lectures-l-afro-diasporiques-r-experiences-sensibles-croisees-a-partir-du-mexique-noir.html